Du 13 février au 5 mars 2020
Cette exposition met à l’honneur la série Wunderkamera de l’artiste Marco Sanges, photographe italien basé à Londres. Sa signature ? Des photographies mystérieuses en noir et blanc, inspirées par le monde du cinéma muet et le surréalisme. Cette série nous plonge dans l’univers artistique de Marco Sanges, des images oniriques accentuées par des effets de surimpression dont les interprétations multiples invitent à la rêverie.

À travers la vision de Sanges, ce ne sont pas les courtisans, les chambellans et les écuyers du roi dont les fantômes s’étalent sur les murs mais d’autres apparitions tout aussi mystérieuses. Ici, une femme tenant une ombrelle chevauche un poisson dans l’obscurité, là une autre égérie peu vêtue, mais gantée, semble dialoguer avec un énorme insecte ; plus loin, d’étranges coquillages errent entre l’ombre et la lumière et voguent autour d’une forme indéfinissable, tandis qu’ailleurs un visage nous sourit à travers l’aile d’un papillon, ou d’une libellule, parmi des coraux au pied desquels d’énormes œufs trônent comme gardant le seuil d’un nid inaccessible.

L’artiste a baptisé cette série Wunderkamera, ce qui veut dire camera miraculeuse, ou plutôt appareil photo miraculeux, car c’est bien de la « chambre noire » qu’il s’agit. Mais de l’obscurité du procédé photographique, Sanges fait naître un univers lumineux. Non pas la lumière de la nature, toute solaire, mais la clarté de l’esprit qui imagine et révèle les stratifications du rêve et de l’inconscient. Formé par un oncle photographe, « impressionné » dès l’adolescence par le cinéma des commencements et par le mouvement surréaliste, il a gardé de cet itinéraire visuel et cérébral l’attirance pour l’invisible et le goût des images oniriques. Surimpressions, constructions et collages, associations de mondes aperçus et de souvenirs à moitié effacés forment ainsi le matériel de la création de Sanges, ou plutôt son immatériel. Mais à l’inverse d’une grande partie des adeptes du surréalisme, il n’affiche ni idéologie, ni hostilité provocatrice. La poésie du hasard et l’amour des signes, qui suggèrent autant qu’ils égarent, règne dans ce monde de l’au-delà dont l’atmosphère rappelle certaines photographies spirites de la fin du XIXe siècle Mais les grandes figures du cinéma traversent aussi ce voyage intérieur : le Nosferatu et le Faust de Murnau, Le Vampire de Dreyer ou La Chute de la Maison Usher de Jean Epstein semblent planer sur ces photographies, comme un regard nostalgique autant qu’empli de fantaisie.
— Jean-David Jumeau-Lafond, Historien de l’art, expert du symbolisme



